05 août 2013

Fantasia 2013

            C’est devenu une tradition annuelle sur ce blogue, à un point tel qu’il devient difficile d’imaginer une façon neuve d’amorcer le sujet. Passons donc outre cette convention pour aborder tout de suite la 17e édition du célèbre festival montréalais consacré à la célébration du cinéma « de genre ».
            Comme c’est souvent le cas, le temps et l’éloignement ont limité le nombre de séances auxquelles j’ai assisté cette année. Ma présence à Fantasia s’est en effet réduite à fréquenter les salles obscures les 2, 3 et 4 août derniers en compagnie d’Ariane et de Patrick. Ce fut l’occasion de revoir de vieux amis habitués du festival comme Simon Laperrière (notamment responsable du volet « Camera Lucida »), Martin Sauvageau, l’un des organisateurs de la première heure (1996 !), Jonathan Reynolds et sa compagne, Julie.
            Cette année encore, le festival offrait une programmation riche et des projections qui se démarquaient par leur atmosphère festive. L’amour de ce cinéma était tangible, tant l’enthousiasme régnait. Année après année, le festival ne perd rien de sa pertinence.
            Arrivée : vendredi en fin d’après-midi, après une semaine de travail bien remplie (Ariane est en ce moment très prise par diverses tâches relatives à son doctorat et par ses projets littéraires ; de mon côté, j’achève un projet destiné à l’éditeur
Rivière Blanche. Quelques parutions (nouvelles) sont en outre prévues pour l’automne. Si cela vous intéresse, les informations à ce sujet seront dévoilées sur ce blogue lorsque le temps sera venu).
            Après m’être procuré le dernier numéro de Fangoria (dossier consacré à Jess Franco, rien de moins), je me suis dirigé vers le cinéma Imperial afin d’assister à la première de Curse of Chucky. L’idée de tenir l’événement un vendredi soir était judicieuse, puisqu’il s’agit d’une bande festive et légère. Soyons honnêtes : il faut ajuster ses attentes pour apprécier le sixième volet d’une série populaire d’horreur humoristique mettant en scène une poupée meurtrière. Si le concept a jadis donné lieu à un premier volet honnête et à un quatrième épisode réussi (entre autres à cause du talent du réalisateur chinois Ronny Yu), il n’était pas simple de le renouveler dans le contexte actuel et d’en proposer une variation pertinente 25 ans après Child’s Play.
            En tenant compte de ces éléments, le visionnement s’est avéré sympathique. Aux ambitions modestes du film correspondra sa diffusion, puisque le film sortira directement en vidéo (avec, peut-être, une sortie technique, brève et limitée à quelques salles, ce qu’on appelait jadis dans la presse une sortie « à la sauvette »). Les fans de la série relèveront plusieurs références aux opus précédents. Le scénariste et réalisateur Don Mancini a opté pour une approche traditionnelle (contrairement à l’optique « méta » propre à plusieurs suites sorties dernièrement). Ainsi, la poupée possédée par l’esprit de l’assassin Charles Lee Ray sévit dans une grande demeure à l’ancienne. Si le scénario se permet plusieurs facilités (Chucky ayant souvent l’occasion de s’en prendre à ses victimes sans profiter du contexte, évidemment pour ménager des effets dramatiques), le résultat final est divertissant pour autant qu’on ajuste ses attentes. À noter : dans les entrevues qu’il a accordées à la presse, Don Mancini a souvent affirmé que Curse of Chucky voulait revenir à un ton plus dramatique et sérieux, voire effrayant. Si les passages humoristiques sont plus restreints que dans les deux derniers épisodes, ils n’en sont pas moins nombreux, et le film gagne assurément à être envisagé (et vu) comme une comédie. L’atmosphère effervescente de la salle a joué un rôle dans ce visionnement quasi interactif. En bref, un petit film sympathique surtout destiné aux amateurs.
 
            Je me suis ensuite rendu avec Ariane à la salle J. A. de Sève pour la première mondiale de Plus one, du réalisateur grec Dennis Iliadis, à qui l’on doit le remake (inutile, mais esthétiquement et techniquement soigné) de Last House on the Left. Plus One, assez différent, a été écrit, produit et réalisé par Iliadis. Il est ardu d’en dévoiler l’intrigue sans trop en dire. Contentons-nous de signaler qu’il s’agit d’un film de science-fiction dont l’intrigue se déroule pendant une gigantesque soirée festive. Le résultat ne m’a guère laissé une impression impérissable. La réalisation est plutôt fonctionnelle, et les protagonistes adolescents s’apparent à ceux, mille fois vus, des productions actuelles destinées à ce public (c’est donc dire qu’il sera question de Facebook, de téléphones cellulaires et de tout le reste, facile à deviner). Si on doit mentionner une certaine volonté du réalisateur de sortir des sentiers battus, il n’en demeure pas moins que l’élément spéculatif du film est très classique et constitue même l’un des clichés de la littérature fantastique du XIXe siècle. Par ailleurs, une idéologie pour le moins discutable se dégage de l’ensemble du film.
            Samedi, 3 août : 5-25-77 de Patrick Read Johnson. Peut-être aurais-je dû me renseigner davantage ! Parfois, il m’arrive de ne pas souhaiter obtenir beaucoup d’informations avant de découvrir une œuvre afin de me réserver quelques surprises. Ce que je savais, c’était que le scénario relatait la vie d’un jeune réalisateur obsédé par le cinéma de genre à la fin des années 70 (d’où le titre).
      Une recherche subséquente révèle que le réalisateur a commis (c’est le cas de le dire) le « chef-d’œuvre » Les Aventures de bébé, alias Baby’s Day Out, l’une de ces insipides comédies américaines que s’arrachaient les clients du club vidéo familial où je travaillais jadis, à ma plus grande perplexité. Payer pour s’infliger ça, vraiment ? Le reste de la filmographie de Johnson est assez chiche, et ce film, réalisé en 2007, demeure inachevé à l’heure actuelle. Lors de la présentation qui a précédé la projection, Johnson disait que son long-métrage « traînait dans une boîte » et qu’il avait voulu l’en sortir afin de le présenter à Fantasia, malgré ses nombreux défauts. Une telle présentation indiquait en quelque sorte à quoi s’attendre.        
         Le film est à ce point autobiographique que le jeune protagoniste porte le même nom que le réalisateur, adolescent passionné par les blockbusters américains que furent Star Wars, Jaws et Planet of the Apes. Une mention écrite au début de 5-25-77 précise d’ailleurs à quel point la part de fiction est réduite.
Faisons simple : il s’agit essentiellement d’un cinéma de « consommateur » plus que de « créateur ». En effet, le jeune apprenti se borne à commencer (sans les terminer) des suites aux films qui l’ont impressionné, sans innover ou sans essayer de leur donner une touche personnelle. Devenu adulte, Johnson a réalisé un long-métrage dont les défauts s’apparentent à ceux qu’il tournait trente ans auparavant. Les fans de Star Wars aimeront peut-être ce projet pour ses innombrables références au classique de George Lucas. Je dois avouer être peu intéressé par les blockbusters hollywoodiens qui, habituellement, suscitent en moi un grand ennui. De voir le jeune héros se pâmer devant Star Wars, les yeux larmoyants, sera donc apprécié ou non selon les sensibilités de chacun. On se contentera de dire que le premier film du jeune Johnson sortira 23 ans après les événements narrés dans 5-25-77 et qu’il s’agira de la comédie « ringarde » Spaced Invaders. Il faut croire que les modèles qu’étaient Lucas ou Spielberg n’ont guère produit un épigone aussi ambitieux que ses inspirateurs…  
          À 21 h 15 commençait le meilleur film vu cette année à Fantasia, You’re Next de Adam Wingard, présenté par le comédien/réalisateur Joe Swanberg. Le scénario prend pour point de départ une invasion de domicile, mais le résultat final dépasse et transcende le concept pour le hausser à un niveau supérieur. Encore une fois, je ne dévoilerai pas les surprises qui émaillent le déroulement du récit, mais les connaisseurs (et les autres !) devraient les apprécier. You’re Next s’inscrit résolument au sein du cinéma horrifique, avec ce que cela implique de débordements visuels, de scènes-choc et de moments de tension. J’ai cru repérer l’influence du cinéma d’épouvante italien des années 70 et 80 en raison de la musique électronique utilisée dans la seconde moitié du film, mais également grâce à la construction scénaristique, à un climat quasi onirique par moments et à certains partis pris esthétiques.
           Le film a été accueilli par un public (parfois trop) enthousiaste qui, comme c’est souvent le cas à Fantasia, m’a à la fois réjoui et rendu perplexe. Réjoui par son énergie, mais rendu perplexe par ses rires aussi nombreux qu’inappropriés lors de scènes dramatiques. J’y vois un manque d’empathie qui me laisse songeur, ce qu’avait d’ailleurs naguère relevé le journaliste Harvey Fenton dans un numéro de son périodique Flesh and Blood. Public blasé ? Protection puérile contre un sentiment de malaise ? Inconscience ? Désir de prouver sa virilité ? On pourrait rétorquer qu’après tout, « ce n’est qu’un film », mais je me demande alors pourquoi ne pas choisir d’aller voir une comédie si notre but est de rire aux éclats.
            Quoi qu’il en soit, je suis curieux de découvrir les prochains projets de ce cinéaste.
            Dimanche, enfin, je me suis rendu à la projection de Tales from the Dark Part 1, film à sketches made in Hong Kong. Avec un tel titre, on pouvait s’attendre à une œuvre sombre ou effrayante, alors que l’humour est constamment présent. Le spectateur y retrouvera des fantômes similaires à ceux que le cinéma japonais de la dernière décennie a popularisés. J’imagine que le résultat, soigné et classique, trouvera son public. Pour ma part, ce genre de productions en série, quelque peu répétitives malgré de bons moments, m’a éloigné du genre.
            Je terminerai en signalant que le festival se termine le 7 août prochain et qu’il mérite assurément d’être découvert… en attendant l’édition 2014.           

03 juin 2013

En librairie !

Les textes mentionnés dans un précédent billet sont tous disponibles en librairie. Le recueil de nouvelles Dimension préhistoire peut être commandé sur le site de l'éditeur Rivière Blanche. Les lecteurs québécois devraient toutefois vérifier préalablement avec l'éditeur s'il expédie au Canada.

Et enfin, si vous aimez les romans fantastiques originaux et ciselés, comment ne pas vous suggérer :

09 avril 2013

Adieu, Jess Franco

Depuis le décès de Jess Franco, de nombreux hommages ont été rendus au cinéaste espagnol un peu partout sur le web et dans la presse. Que peut-on ajouter ?

Puisque Franco adorait la musique, j'ai pensé arranger et enregistrer au piano les thèmes de deux de ses films. Les voici, en guise d'ultime remerciement (document mis en ligne par BB Jane. Merci !).



29 mars 2013

Jean Rollin, par-delà le temps

J'ai déjà parlé à quelques reprises du cinéaste et écrivain Jean Rollin sur ce blogue. La découverte de son cinéma, alors que j'étais âgé de seize ou dix-sept ans, a certainement été un moment mémorable. Le climat onirique de ses films, la littérarité de leurs dialogues, l'étrangeté revendiquée de leur scénario et leur identité fortement européenne constituaient autant de surprises après la découverte des classiques américains du fantastique signés Carpenter, Romero et autres. Lorsque les éditions Fleuve Noir firent paraître dans leur collection "Angoisses" le roman Les Deux orphelines vampires de Rollin, je me le suis aussitôt procuré, et j'en garde un vif souvenir, imprégné d'un parfum printanier. Par la suite, j'écrivis à Rollin pour lui transmettre mes compliments. J'eus l'occasion, au fil des années, d'échanger quelques lettres avec lui et de préparer un dossier consacré à son oeuvre, dossier qui parut dans le défunt périodique imagine... (numéro 78). Une dizaine d'années plus tard, l'homme venait présenter à Montréal son dernier film, La Nuit des horloges. En proie à des ennuis de santé depuis un bon moment déjà, il se montra malgré tout à la fois humble, généreux (donnant autour de lui livres et DVD) et anxieux de découvrir la réception critique de son film. Mon ami Patrick Lambert et moi avons eu l'idée d'interviewer Jean Rollin et de lui poser diverses questions sur des sujets qui avaient été moins souvent abordés par les journalistes, entre autres à propos de ses relations avec les derniers surréalistes français et de son amour du roman noir. Filmée par Patrick, la discussion resta inédite pendant plusieurs années, puis, lorsque nous apprîmes, Patrick et moi, que la firme Kino Lorber avait pour projet d'éditer les films de Rollin sur Blu-Ray, nous avons songé qu'il serait dommage de ne pas diffuser ce document qui permet de dialoguer avec Jean Rollin par-delà la barrière du temps, le cinéaste nous ayant hélas quittés en décembre 2010. Ce sera chose faite dès avril avec la parution du Blu-Ray des Raisins de la mort, film fantastique écologique qui demeure l'un des "Rollin" les plus accessibles. Il peut constituer une bonne porte d'entrée dans son univers. Il ne nous reste plus qu'à espérer que l'entrevue, d'une durée de 49 minutes, saura plaire aux cinéphiles...

15 mars 2013

Dégel littéraire

Je profite du printemps qui s'annonce pour donner signe de vie. Comme vous le savez sans doute, ce blogue a dû être délaissé au cours des derniers mois. Ce n'était pas par désintérêt, mais par manque de temps. Cela étant dit, quelques lecteurs de ce blogue ont communiqué avec moi pour obtenir des nouvelles à propos des parutions à venir. J'attendais que les contrats d'édition soient signés avant d'officialiser le tout. C'est maintenant chose faite, et voici la liste des futures publications.
Depuis longtemps déja, j'aime les fanzines européens consacrés au cinéma. On trouve dans ces périodiques une passion communicative que des plumes incisives et originales mettent au service de films souvent aussi obscurs qu'étonnants. Plusieurs d'entre eux sont hélas disparus, comme le mythique Cine Zine Zone auquel j'eus jadis la chance de participer avant le décès de son responsable, Pierre Charles. Avec la démocratisation d'Internet, la période faste de ces publications a semblé révolue pendant plusieurs années, mais cette presse spécialisée connaît un regain de vitalité depuis un moment.

Médusa est l'un des valeureux survivants de la grande époque du fanzinat français. Toujours sous la direction de son fondateur, Didier Lefèvre, le numéro 24 est paru voilà quelques mois. Au sommaire de ce numéro fort intéressant, on retrouve entre autres des entretiens inédits (dont une rencontre avec le pittoresque Giovanni Lombardo Radice, vu dans plusieurs classiques du cinéma bis comme Frayeurs de Lucio Fulci. L'homme a également travaillé avec Umberto Lenzi, Antonio Margheriti, Joe d'Amato et Michele Soavi), un article sur la période pendant laquelle Tobe Hooper (Texas Chainsaw Massacre) travailla pour la firme Cannon, un dossier sur les documentaires-chocs surnommés "Mondo Movies", un survol des dernières productions de la mythique Hammer Films, ressuscitée depuis quelques années, quatre pages sur Frank Henenlotter (Basket Case) et beaucoup de textes au sujet de films qui appartiennent à la grande famille du cinéma de genre : série B américaine, fantastique espagnol, westerns italiens, etc. Le ton y est à la fois érudit et décontracté, passionné mais avec une touche d'humour. On trouvera des comptes rendus de films aux titres étonnants comme Confessions of a Psycho Cat ou Bikini Frankenstein (!), mais aussi un portrait de la comédienne culte Meiko Kaji et bien d'autres choses encore. J'y signe quelques textes, notamment sur Roger Watkins et Radley Metzger. Bonne nouvelle pour les lecteurs québécois : Médusa est disponible depuis peu à la Boîte Noire, club vidéo montréalais bien connu.

À paraître ce printemps :

- "Le chemin délesté" (nouvelle) dans Solaris 186 (avril 2013). Cette nouvelle qui porte sur le deuil et sa symbolique m'a demandé beaucoup de travail, car je souhaitais aborder le sujet de façon sensible. Ce numéro de Solaris sera consacré au fantastique urbain.
 
- "La planète des horreurs" dans le prochain numéro de la revue XYZ (mai 2013). Si vous trouvez le titre de cette nouvelle quelque peu feuilletonesque, vous n'avez pas tort. Elle fait partie d'un projet piloté par Jean-Pierre April : "Le retour du bon vieux futur". Il regroupe des pastiches et des parodies des romans d'aventures populaires des années 1950 et 1960. Au sommaire de ce numéro de XYZ, on pourra lire, outre mon texte, des parodies et des pastiches signés Jean-Pierre April, Geneviève Blouin, Michel Châteauneuf et Ariane Gélinas.

- Mon roman Le Mausolée des matins blêmes paraîtra en mai aux éditions Andara. Ce thriller m'a demandé plusieurs années de travail et de réflexion, malgré sa concision. Une brève présentation : Chansonnier au chômage, Alain Dupont consulte en vain les offres d’emploi dans les journaux. Il est persuadé que son destin ne peut s’aggraver. Et s’il avait tort ? Si un soir, en rentrant chez lui, il faisait une découverte particulièrement désagréable ? Serait-il tenté d’oublier son sort en buvant quelques verres de trop ? Il suffit parfois d’un enchaînement de circonstances en apparence fortuites pour que la malchance s’en mêle. De là à se réfugier dans une bâtisse délabrée pour échapper à un danger soudain, il n’y a qu’un pas. Mais qu’arrive-t-il quand cet abri dissimule une menace aussi grande qu’imprévisible ?


- En juin 2013 paraîtra chez Rivière Blanche l'anthologie Dimension préhistoire, sous la direction de Meddy Ligner. Le titre indique bien la thématique qui servira de fil conducteur aux nouvelles réunies dans ce recueil. C'était un défi très intéressant à relever, et j'ai tenu à proposer un texte d'une certaine ampleur (le titre : "Pour que s'anime le ciel factice"). J'apprécie particulièrement les publications de Rivière Blanche, c'est donc avec enthousiasme que j'ai accepté de participer au projet. Au sommaire, on retrouve une nouvelle de ma précieuse compagne, Ariane Gélinas, mais également des textes de Jean-Louis Trudel, Orson Scott Card, Pierre Gévart et bien d'autres encore.

En bref, un dégel littéraire des plus emballants, avec d'autres projets à venir que je dévoilerai ici lorsqu'ils se seront concrétisés.

Je termine ce billet en vous souhaitant un agréable printemps 2013.