C’est
devenu une tradition annuelle sur ce blogue, à un point tel qu’il devient
difficile d’imaginer une façon neuve d’amorcer le sujet. Passons donc outre cette
convention pour aborder tout de suite la 17e édition du célèbre
festival montréalais consacré à la célébration du cinéma « de
genre ».
Comme c’est
souvent le cas, le temps et l’éloignement ont limité le nombre de séances
auxquelles j’ai assisté cette année. Ma présence à Fantasia s’est en effet
réduite à fréquenter les salles obscures les 2, 3 et 4 août derniers en
compagnie d’Ariane et de Patrick. Ce fut l’occasion de revoir de vieux amis
habitués du festival comme Simon Laperrière (notamment responsable du volet
« Camera Lucida »), Martin Sauvageau, l’un des organisateurs de la
première heure (1996 !), Jonathan Reynolds et sa compagne, Julie.
Cette année
encore, le festival offrait une programmation riche et des projections qui se
démarquaient par leur atmosphère festive. L’amour de ce cinéma était tangible,
tant l’enthousiasme régnait. Année après année, le festival ne perd rien de sa
pertinence.
Arrivée :
vendredi en fin d’après-midi, après une semaine de travail bien remplie (Ariane
est en ce moment très prise par diverses
tâches relatives à son doctorat et par ses projets littéraires ; de mon côté,
j’achève un projet destiné à l’éditeur
Rivière Blanche. Quelques parutions (nouvelles) sont en outre prévues pour
l’automne. Si cela vous intéresse, les informations à ce sujet seront dévoilées
sur ce blogue lorsque le temps sera venu).
Après
m’être procuré le dernier numéro de Fangoria (dossier consacré à Jess
Franco, rien de moins), je me suis dirigé vers le cinéma Imperial afin
d’assister à la première de Curse of Chucky. L’idée de tenir l’événement un
vendredi soir était judicieuse, puisqu’il s’agit d’une bande festive et légère.
Soyons honnêtes : il faut ajuster ses attentes pour apprécier le sixième
volet d’une série populaire d’horreur humoristique mettant en scène une poupée
meurtrière. Si le concept a jadis donné lieu à un premier volet honnête et à un
quatrième épisode réussi (entre autres à cause du talent du réalisateur chinois
Ronny Yu), il n’était pas simple de le renouveler dans le contexte actuel et
d’en proposer une variation pertinente 25 ans après Child’s Play.
En tenant
compte de ces éléments, le visionnement s’est avéré sympathique. Aux ambitions
modestes du film correspondra sa diffusion, puisque le film sortira directement
en vidéo (avec, peut-être, une sortie technique, brève et limitée à quelques
salles, ce qu’on appelait jadis dans la presse une sortie « à la
sauvette »). Les fans de la série relèveront plusieurs références aux
opus précédents. Le scénariste et réalisateur Don Mancini a opté pour une
approche traditionnelle (contrairement à l’optique « méta » propre à
plusieurs suites sorties dernièrement). Ainsi, la poupée possédée par l’esprit
de l’assassin Charles Lee Ray sévit dans une grande demeure à l’ancienne. Si le
scénario se permet plusieurs facilités (Chucky ayant souvent l’occasion de s’en
prendre à ses victimes sans profiter du contexte, évidemment pour ménager des
effets dramatiques), le résultat final est divertissant pour autant qu’on
ajuste ses attentes. À noter : dans les entrevues qu’il a accordées à la
presse, Don Mancini a souvent affirmé que Curse of Chucky voulait revenir à un
ton plus dramatique et sérieux, voire effrayant. Si les passages humoristiques
sont plus restreints que dans les deux derniers épisodes, ils n’en sont pas
moins nombreux, et le film gagne assurément à être envisagé (et vu) comme une
comédie. L’atmosphère effervescente de la salle a joué un rôle dans ce visionnement
quasi interactif. En bref, un petit film sympathique surtout destiné aux amateurs.
Je me suis
ensuite rendu avec Ariane à la salle J. A. de Sève pour la première mondiale de
Plus one, du réalisateur grec Dennis Iliadis, à qui l’on doit le remake
(inutile, mais esthétiquement et techniquement soigné) de Last House on the
Left. Plus One, assez différent, a été écrit, produit et réalisé par Iliadis.
Il est ardu d’en dévoiler l’intrigue sans trop en dire. Contentons-nous de
signaler qu’il s’agit d’un film de science-fiction dont l’intrigue se déroule
pendant une gigantesque soirée festive. Le résultat ne m’a guère laissé une
impression impérissable. La réalisation est plutôt fonctionnelle, et les protagonistes
adolescents s’apparent à ceux, mille fois vus, des productions actuelles
destinées à ce public (c’est donc dire qu’il sera question de Facebook, de
téléphones cellulaires et de tout le reste, facile à deviner). Si on doit
mentionner une certaine volonté du réalisateur de sortir des sentiers battus,
il n’en demeure pas moins que l’élément spéculatif du film est très classique
et constitue même l’un des clichés de la littérature fantastique du XIXe
siècle. Par ailleurs, une idéologie pour le moins discutable se dégage de
l’ensemble du film.
Samedi, 3 août : 5-25-77 de
Patrick Read Johnson. Peut-être aurais-je dû me renseigner davantage ! Parfois,
il m’arrive de ne pas souhaiter obtenir beaucoup d’informations avant de
découvrir une œuvre afin de me réserver quelques surprises. Ce que je savais,
c’était que le scénario relatait la vie d’un jeune réalisateur obsédé par le
cinéma de genre à la fin des années 70 (d’où le titre).
Une
recherche subséquente révèle que le réalisateur a commis (c’est le cas de le
dire) le « chef-d’œuvre » Les Aventures de bébé, alias Baby’s Day
Out, l’une de ces insipides comédies américaines que s’arrachaient les clients
du club vidéo familial où je travaillais jadis, à ma plus grande perplexité.
Payer pour s’infliger ça, vraiment ? Le reste de la filmographie de Johnson est
assez chiche, et ce film, réalisé en 2007, demeure inachevé à l’heure actuelle.
Lors de la présentation qui a précédé la projection, Johnson disait que son
long-métrage « traînait dans une boîte » et qu’il avait voulu l’en
sortir afin de le présenter à Fantasia, malgré ses nombreux défauts. Une telle
présentation indiquait en quelque sorte à quoi s’attendre.
Le film est
à ce point autobiographique que le jeune protagoniste porte le même nom que le
réalisateur, adolescent passionné par les blockbusters américains que furent
Star Wars, Jaws et Planet of the Apes. Une mention écrite au début de 5-25-77
précise d’ailleurs à quel point la part de fiction est réduite.
Faisons simple : il s’agit
essentiellement d’un cinéma de « consommateur » plus que de
« créateur ». En effet, le jeune apprenti se borne à commencer (sans
les terminer) des suites aux films qui l’ont impressionné, sans innover ou sans
essayer de leur donner une touche personnelle. Devenu adulte, Johnson a réalisé
un long-métrage dont les défauts s’apparentent à ceux qu’il tournait trente ans
auparavant. Les fans de Star Wars aimeront peut-être ce projet pour ses
innombrables références au classique de George Lucas. Je dois avouer être peu
intéressé par les blockbusters hollywoodiens qui, habituellement, suscitent en
moi un grand ennui. De voir le jeune héros se pâmer devant Star Wars, les yeux
larmoyants, sera donc apprécié ou non selon les sensibilités de chacun. On se
contentera de dire que le premier film du jeune Johnson sortira 23 ans après les événements narrés dans 5-25-77 et qu’il s’agira de la comédie
« ringarde » Spaced Invaders. Il faut croire que les modèles
qu’étaient Lucas ou Spielberg n’ont guère produit un épigone aussi ambitieux
que ses inspirateurs…
À 21 h 15
commençait le meilleur film vu cette année à Fantasia, You’re Next de Adam
Wingard, présenté par le comédien/réalisateur Joe Swanberg. Le scénario prend
pour point de départ une invasion de domicile, mais le résultat final dépasse
et transcende le concept pour le hausser à un niveau supérieur. Encore une
fois, je ne dévoilerai pas les surprises qui émaillent le déroulement du récit,
mais les connaisseurs (et les autres !) devraient les apprécier. You’re Next
s’inscrit résolument au sein du cinéma horrifique, avec ce que cela implique de
débordements visuels, de scènes-choc et de moments de tension. J’ai cru repérer
l’influence du cinéma d’épouvante italien des années 70 et 80 en raison de la musique électronique utilisée dans la seconde moitié du film, mais
également grâce à la construction scénaristique, à un climat quasi onirique par
moments et à certains partis pris esthétiques.
Le film a
été accueilli par un public (parfois trop) enthousiaste qui, comme c’est
souvent le cas à Fantasia, m’a à la fois réjoui et rendu perplexe. Réjoui par
son énergie, mais rendu perplexe par ses rires aussi nombreux qu’inappropriés
lors de scènes dramatiques. J’y vois un manque d’empathie qui me laisse
songeur, ce qu’avait d’ailleurs naguère relevé le journaliste Harvey Fenton
dans un numéro de son périodique Flesh and Blood. Public blasé ? Protection
puérile contre un sentiment de malaise ? Inconscience ? Désir de prouver sa
virilité ? On pourrait rétorquer qu’après tout, « ce n’est qu’un
film », mais je me demande alors pourquoi ne pas choisir d’aller voir une
comédie si notre but est de rire aux éclats.
Dimanche,
enfin, je me suis rendu à la projection de Tales from the Dark Part 1, film à
sketches made in Hong Kong. Avec un tel titre, on pouvait s’attendre à une
œuvre sombre ou effrayante, alors que l’humour est constamment présent. Le
spectateur y retrouvera des fantômes similaires à ceux que le cinéma japonais
de la dernière décennie a popularisés. J’imagine que le résultat, soigné
et classique, trouvera son public. Pour ma part, ce genre de productions en
série, quelque peu répétitives malgré de bons moments, m’a éloigné du genre.
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