Décor : années 50. On cherche une autre Marylin Monroe, une Marylin "bis". Battre le fer pendant qu'il est chaud. On tentera toujours de reprendre une recette à succès. Des psychanalystes l'expliquent en affirmant qu'il est impossible de renoncer à un plaisir qu'on a connu. Il y aura Mamie Van Doren et quelques autres, dont la plus particulière est peut-être Margaret Lee, doublure de Monroe qui, très sage au départ, finira par commettre un meurtre qui mettra un terme à sa carrière et l’enverra en prison. Elle n'aimait pas ce fan qui lui faisait une cour trop assidue, dira-t-elle pour se justifier. Certaines ont le couteau facile. Pour reprendre le titre d'un polar écorné qui traîne chez moi, Les blondes ont la vie dure.
Il y aura Jayne Mansfield. Dotée, dit-on, d’un quotient intellectuel supérieur, elle incarnait généralement des personnages de « blonde idiote », déjà un vieux cliché qui - comme les blondes - a la vie dure. Dure comme la mort.Soyons pittoresques : à ses débuts, Jayne a refusé d’être nommée Miss Fromage Roquefort, car elle trouvait que « ça ne sonnait pas bien » à l’oreille. En vérité… Pourtant, elle était assez carriériste, il faut le dire, rêvant d’être une superstar. À 21 ans, elle déménage à Los Angeles avec son époux de l’époque, pour prendre des cours d’art dramatique. Elle décroche de petits rôles dans des films aux jolis titres, que je n’ai d’ailleurs pas vus, mais que j’aime commenter malgré tout, soyons imaginatifs :
FEMALE JUNGLE (1953) – visions d’une jungle de carton pâte dominée par une tribu d’amazones. Quelque part, entre deux stock-shots, Jayne Mansfield, sa blondeur écrasée par un soleil en noir et blanc.
PETE KELLY’S BLUE (1955), dans lequel elle incarne « la fille à la cigarette », que je me plais à imaginer en femme fatale, fréquemment accoudée au comptoir d’un bar de jazzmen, une femme fatale dont la sœur spirituelle serait Dominique Wilms, « La môme vert-de-gris ».Tout cela est bien joli, mais le vrai début de miss Mansfield se produit à New York, dans la comédie WILL SUCCESS SPOIL ROCK HUNTER… On croit que tout est parti pour la gloire, ensuite, avec de grosses productions hollywoodiennes (et parues en DVD récemment), dont THE GIRL CAN’T HELP IT, qui la lance (comédie rock and roll, dont le technicolor flamboyant souligne le caractère factice… Mansfield incarne une ingénue qui n’a aucun talent pour le chant. Son prétendant, obnubilé par elle, veut absolument en faire une chanteuse à succès. Ça vous rappelle quelque chose ? Moi oui...! Entre des prestations musicales tapageuses (dont celles de Little Richard, de ce cher Gene Vincent et de Julie « Cry me a River » London), la comédie bon enfant déroule ses vagues dans lesquelles il fait bon s’immerger si, dans le cœur, on a besoin d’un réconfort hivernal. Quant à Julie London, elle a réussi sa carrière essentiellement à cause de ses pochettes d'albums...Quelques films remportent du succès, on parle beaucoup de Jayne dans les journaux mondains…
Et c’est ensuite qu’elle commence à m’intéresser plus. Quoi que... je l'aime aussi avant, quand même, Jayne, car je sens en elle et autour d'elle un délire sous-jacent et permanent.
Jayne s’éprend du culturiste hongrois Mickey Hargitay, ex Monsieur Univers 1955, celui-là même qui incarnerait par la suite quelques-uns des rôles les plus hallucinés du cinéma italien. Je pense notamment au BOURREAU ÉCARLATE (1965) du film du même nom, dans lequel il hurlait « Je suis le bourreau écarlate » dans les sous-sols d’un château aménagé pour terrifier un groupe de photographes de mode, le tout dans des couleurs pop art et dans des décors expressionnistes (ô, toile d’araignée géante, comme je me souviens de toi).Jayne Mansfield adorait la couleur rose au point de se faire construire un véritable palais dont tous les objets étaient de cette couleur. Son époux Hargitay, qui adorait sa femme, en fut le maçon et l’architecte. Mansfield le remercia en le trompant à qui mieux-mieux et en le quittant sans remords. En retour, Hargitay n’oublia jamais Jayne Mansfield. Je me souviens d’un documentaire tourné récemment, dans lequel il pleurait encore en repensant à Jayne.
J’aimerais bien, un jour, faire l’objet d’une telle fidélité…
Poursuivons charitablement...:
Au cours de sa carrière, Jayne avait la fâcheuse manie de multiplier les incidents du style « sein de Janet Jackson exposé pendant le superbowl ». C’étaient toujours, selon la principale intéressée, des « accidents », mais leur caractère répétitif laissait certains détracteurs sceptiques.
Les bons rôles s’épuisent. Monroe est morte en 1962. On cherche autre chose, en ce début de décennie 1960. Le cinéma européen récupère Jayne, voulant essentiellement profiter de son statut de sex-symbol. Le noir et blanc remplace le technicolor friqué, Jayne se dénude pour PLAYBOY, a des aventures de plus en plus extravagantes (on raconte entre autres que Hargitay l’a surprise avec deux hommes - à replacer dans le contexte du début des années 60 svp), boit de plus en plus, pleure, est malheureuse, etc.
Son visage s’épaissit, s’enlaidit. Où est passée la jeune femme qui, au départ, donnait l’illusion d'être une gentille ingénue incapable de se rendre compte de l’effet qu’elle produisait ? Elle a été absorbée par l’autre, fausse-vamp racoleuse au visage boursouflé. Et il y a la tristesse, au fond de ce regard plein d'une joie fabriquée.
Quelques beaux titres de films avec Jayne Mansfield, post-1960 :
- Les amours d’Hercule
- The Dumbest Blonde
- The Fat Spy
- The Las Vegas Hillbillys (film country)
Je garde le plus bizarre pour la fin.
Jayne a connu un destin tragique : elle est morte dans un accident de voiture qui l’a décapitée. Sa vie, de toute façon, avait pris une tournure de plus en plus chaotique. On parle d’une liaison avec Anton La Vey, le dirigeant de l’Église de Satan. Cette photo tend à prouver qu’ils se connaissaient, en tout cas:D’aucuns, avec le goût du sensationnalisme et de l’occulte, disent que l’accident a été provoqué par La Vey, à qui Mansfield se refusait un peu trop…
Dernier film pour Jayne Mansfield : un film-collage halluciné (que je n’ai pas vu, d’ailleurs, alors voilà pour la crédibilité) intitulé THE WILD, WILD WORLD OF JAYNE MANSFIELD. En gros, un producteur avisé a acheté des archives personnelles de Jayne, petits films amateurs qui sont en fait des souvenirs de voyage, où on la voit dans diverses villes, souriante, etc. Il y a intégré une narration récitée par une imitatrice de Jayne… Ces scènes servent d’intermède entre deux visites de boîtes à strip-teases, dans lesquelles Mansfield n’a bien entendu jamais mis les pieds.Pour clouer le cercueil, ce "documentaire" se termine par des extraits d’archives tournées après l’accident de voiture de Mansfield. On y voit la voiture démolie, etc. Et on finit avec une visite de son palais rose, déserté, le tout présenté par un Mickey Hargitay complètement défait. Une épitaphe plutôt… cynique ?
Pauvre petite Jayne, paumée dans la nuit hollywoodienne et dans les décors de carton-pâte de Cinecitta ! On aurait envie de te prendre dans nos bras pour te dire que tout ira bien. Alors, en arrière-plan, on entendrait Brian Wilson chanter "Don't Worry Baby" et on aurait l'impression furtive que tout est encore à construire... et que, peut-être, le soleil ne se couchera plus.
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19 commentaires:
Ça donne encore plus envie de la découvrir la tite dame. Un coup le travail de revues terminé, je me lance dans ses trucs !! Yes sir ! Après les ANGEL GUTS bien sûr. ;)
On se tapera un Jayne su' ta gros tivi. hehe
Eh, mon cher Buko-San, tu m'mets de bonne humeur, tu savais ça ? Ben oui...!
Les deux que j'ai vus sont d'amusantes comédies (gentiment "sexy") dont l'intérêt primordial est Jayne (sa personnalité y fait beaucoup).
Et je te ferai entendre son CD... Y a quelques chansons assez rigolotes dans le lot. J'ai aussi oublié de parler de sa voix suraiguë samplée par Sigue Sigue Sputnik, mais, bon... ça viendra bien.
Merci des commentaires !
Bel hommage aussi dans CRASH, de Cronenberg. Va-t-on avoir prochainement droit à un hommage à Anna-Nicole Smith ? ;-)
Le bourreau écarlate, c'est moé ast'heurre !
P.S. - Sigue Sigue Sputnik ? Au secours :-)
J'ignorais qu'il y avait un hommage à Jayne Mansfield dans CRASH.
Et que dire de Sigue Sigue Sputnik ?!!! Je les connais depuis que j'ai 14 ans, alors t'imagines le nombre de fois que j'ai pu entendre LOVE MISSILE F1-11, l'une de ces chansons dont je ne me lasse jamais, aussi absurde que ça puisse paraître.
J'aimerais vous ajouter, Buko-San et toi, dans mes liens, mais j'ignore comment faire ! Si vous le savez, je vous écoute !
Pat te l'expliquerait mieux que moi virtuellement car je n'ai en ce moment pas dormi depuis jeudi soir et disons que ce ne fut pas ma meilleure nuit (ni la plus longue).
Oui, tu n'as pas vu CRASH ? Je ne voudrais pas te rappeler de quoi il s'agit en te SPOILANT, car je ne suis pas du genre papa gâteau !
C'est vrai que c'est proprement absurde que tu ne te fatigues pas de Sigue Sigue :-)
J'ai vu CRASH, mais voilà dix ans, alors je ne m'en rappelle pas trop.
Pour Sigue Sigue..., ben oui ! J'assume parfaitement d'ailleurs. Disons qu'ils me rendent assez joyeux. Après tout, pourquoi pas, il y a bien des fans d'AC/DC !
Hein ?! Je suis en retard sur les commentaires !! CRASH, ça fait malheureusement trop longtemps que j'ai vu pour faire un lien avec Jayne.... mais euh.... ça sonne un peu humoristique ton truc mon Clifford.
Sinon, pour les liens, je t'expliquerai ça de vive voix, c'est plus facile de pointer que d'écrire le texte que j,avais envoyé à Clifford dans le temps ! hehe
A quand la réédition du livre de Jean Pierre Jackson sur Mansfield bon sang? Je le cherche depuis des lustres... Les éditeurs...hrrh... Joli portrait en tout cas! J'ignorais qu'elle avait côtoyé La Vey.
Je cherche également ce livre. Jackson a une belle plume. J'espérerais aussi une réédition, sans trop y croire... À moins qu'une biographie soit réalisée ou quelque chose du genre qui ramènerait Mansfield à l'avant-plan...
Victoire, j'ai enfin trouvé le bouquin de JPJ!
Bonjour tout le monde, j'étudie Crash depuis quelques années, alors oui oui gros clin d'oeil aux stars notamment à J. Mansfield dans le film on reconstitue son accident...
Merci de l'info !
Étant un fan de Cronenberg, il faudra que je revoie ce film, découvert en salles en 1996 et jamais revu depuis. J'avais apprécié ; j'apprécierai donc encore plus en ayant un bagage référentiel en plus.
pour en savoir plus sur Jayne Mansfield notamment sur son accident lire le livre de Simon Libérati " Jayne Mansfield 1967 " un trés bon livre qui se lit d'un trait que je recomande !!!!!
Je ne l'ai pas encore lu, mais ça me semble vraiment très intéressant. Merci pour la suggestion !
je confirme la suggestion de "anonyme" : le bouquin de Libérati est une mine d'or pour tout fan de Mansfield et de l'époque en général, et, de surcroît, démonte quelques fausses vérités (Jayne M. n'a jamais été décapitée...)par un travail de collecte et de recoupe impressionant. Probablement l'ouvrage de référence sur la Pink Demoiselle...
Merci ! Je comptais me le procurer !
J'adore!!!! J'arrive plusieurs annees apres, mais j'ai beaucoup apprecie la vision tres personnelle de la vie de la mega pin-up des 50's.
Le livre de JP Jackson est en effet tres bien ecrit - le meilleur de tout ce qui a ete publie sur elle. Il y a toutes ces bios qui sortent regulierement, mais qui sont un peu de la teneur de cette emission de Frederic Mitterand: Etoiles et Toile (la vie de Jayne Mansfield y ete contee de facon "poignante" par Lambert Wilson)
Plus serieusement, regardez si vous en avez l'occasion 'The Burglar' (le Cambrioleur) et 'The Wayward Bus' (les naufrages de l'autobus) deux films tournes alors qu'elle etait au fait de sa courte gloire hollywoodienne. Elle y est excellente dans des roles a l'oppose de son image de blonde idiote.
Sinon, l'entendre chanter en allemand 'Snick-Snack Snukelchen' vaut vraiment le detour...
Merci pour ce message enthousiaste, pour les commentaires et les suggestions, dont je tiendrai compte, bien sûr !
Jayne chanteuse, c'est aussi un pan de sa carrière plutôt agréable à découvrir, entre autres sa chanson "That Makes it", parue en single au courant des années 1960 !
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