23 janvier 2008

Dans les poubelles du cinéma québécois, volume 1: LA LUNULE


Ce n'est pas forcément un fait connu, mais le cinéma québécois n'a pas attendu les années 90 pour donner naissance à des oeuvres atypiques se réclamant de la culture populaire. Épouvante, polar, érotisme, tout cela était présent dans les années 70, parfois même plus tôt.

C'est aujourd'hui de l'un de ces films "bis" québécois que je parle : LA LUNULE. Ce charmant bijou satanisant fut réalisé au Québec par l’Américain Harvey Hart, un cinéaste ayant surtout travaillé pour la télévision. Photo de Christopher Plummer tirée du film :Occultisme, quand tu nous tiens ! C'était déjà ce que s'était dit Jean Beaudin pour son film "démoniaque" LE DIABLE EST PARMI NOUS en 1972. Voilà quelques années, une connaissance a travaillé avec Beaudin. Je lui ai demandé de parler de ce film au réalisateur afin de vérifier sa réaction. Elle ne tarda pas ! Il n'en a aucune copie... et ne veut pas en avoir. Pourtant, ce bon vieux DIABLE qui réunit Danielle Ouimet, Daniel Pilon et Louise Marleau ne méritait pas - c'est le cas de le dire - d'être voué aux gémonies...

Mais revenons-en à LA LUNULE. Jean-Louis Roux en grand-prêtre satanique, ça vous tente ?Découvert en version française, LA LUNULE ne manque pas d'attraits : les acteurs francophones se doublent eux-mêmes, mais les anglophones sont doublés par des comédiens qui adoptent un français international et neutre. Il faut donc s’habituer à entendre Donald Pilon (et son accent du terroir profond) donner la réplique à Christopher Plummer, lequel s’exprime comme un Européen. Cela crée un décalage hallucinant, et on ne peut s’empêcher de regarder les dix premières minutes avec un sourire étrange. Pilon est très amusant à voir en inspecteur vaguement blasé... Le site NANARLAND cite cette réplique mémorable de l'acteur (à imaginer en entendant la voix de Pilon dans sa tête):

-J'suis un gars ben correct, mais s'tu m'craches pas l'morceau, j'te promets d'm'occuper d'toué avec tout l'raffinement qu'tu mérites !Quant à Jean-Louis Roux, qui l’eût imaginé affublé d’habits sacerdotaux, prônant le Mal et les ténèbres ? Le voir regarder complaisamment une Karen Black nue et en larmes pendant qu’il lui demande de parler de son enfance est en soi un étrange moment à passer... Et que dire de cette comédienne en larmes doublée par une Louise Turcot hystérique ? Bref, côté psychotronisme, on est servi.

Est-ce donc à dire que THE PYX doit se regarder au dixième degré ? Mais non…! Parce qu’à côté de ces aspects kitsch, le film recèle aussi de belles qualités. La photographie de René Verzier est impeccable (pour autant qu’on puisse en juger dans une copie recadrée) et les chansons « celtisantes » de Karen Black qui servent de trame sonore créent une atmosphère feutrée, cotonneuse et hypnotique.Le film fait également un emploi audacieux du montage parallèle, racontant, sans jamais le préciser, des événements qui ne surviennent pas dans un ordre chronologique. L’aspect occulte n’est pas aussi présent qu’on pourrait le croire, même s’il constitue l’enjeu central de l’intrigue, et il s’agit plutôt d’une enquête policière dans le Montréal 70s. Il s’agit de comprendre ce qui est arrivé à une prostituée trouvée morte après être tombée de l’appartement d’un building, loué par la compagnie « Natas » (subtil, subtil…).

Comme quoi en fouillant dans les poubelles de notre patrimoine, on trouve parfois de bien étranges surprises...

5 commentaires:

losfeld a dit...

Merci pour la découverte, même si je ne connais aucun des acteurs que tu mentionnes...

vincent giard a dit...

Tout pour avoir un peu plus de mon Donald à moi.

Frédérick a dit...

Oh oui !

Dommage que ses rôles se soient espacés avec le temps !

Clifford Brown a dit...

Qui ne connaît pas Pilon ?!

Frédérick a dit...

Hélas, beaucoup de gens ne connaissent pas Pilon ! Demande à Alvaro Vitali, tu m'en donneras des nouvelles.