Lors du festival international de la poésie de Trois-Rivières, Michel Châteauneuf évoquait la liste de ses 10 livres favoris, liste qu'il soumit jadis à ses collègues professeurs du Collège Laflèche. De fil en aiguille, Michel m'a suggéré de soumettre une telle liste sur un autre blogue auquel je collabore. Je l'ai fait, mais me restreindre à dix titres avait quelque chose d'attristant : cela ne permettait pas de commenter - et peut-être de faire connaître - d'autres coups de coeur. Le texte qui suit vise à remplir ce gouffre, au fur et à mesure que la clepsydre, elle, se vide.
Voici quelques jalons filmiques importants pour moi :
- VALÉRIE AU PAYS DES MERVEILLES (alias VALERIE AND HER WEEK OF WONDERS, alias VALERIE A TYDEN DIVU). 1970. Un film tchèque de Jaromil Jires. Une expérience magique, pour un film qui, décidément, est, lui aussi, magique.
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- MAIS NE NOUS DÉLIVREZ PAS DU MAL, film français de Joël Séria (1971). Un extraordinaire premier film. Les cinq premières minutes donnent le ton : deux collégiennes décident de vouer leur vie au mal, en notant leurs mauvaises actions dans un journal.
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- THE WOMAN IN BLACK, téléfilm anglais de Herbert Wise (1989). Pour qui aime les histoires de fantômes, le visionnement de ce film méconnu s'impose. Il contient au moins deux scènes inoubliables. De quoi rendre caducs tous les films de fantômes japonais, RING y compris.
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- UNE VIERGE CHEZ LES MORTS-VIVANTS, film du réalisateur espagnol Jess Franco (1971). Le titre absurde de ce film fut imposé par le producteur, l'oeuvre s'appelant au départ LA NUIT DES ÉTOILES FILANTES. Un film aussi étonnant que beau.
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- EUGÉNIE DE SADE de Jess Franco (1970). Franco est mon cinéaste favori, contre vents et marées. Cette adaptation "modern style" de Sade est une sorte de rêve éveillé doté d'une narration littéraire et poétique en voix-off.
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- LES DEUX ORPHELINES VAMPIRES, film français de Jean Rollin (1995). Une réussite du cinéma fantastique. Un film intelligent doté d'une sensibilité poétique rare, qui fait référence à tout ce que j'aime. La vie, ça devrait être ça.
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- L'ALLIANCE INVISIBLE, alias TUTTI I COLORI DEL BUIO alias ALL THE COLORS OF DARKNESS), film italien de Sergio Martino (1972). Il fallait ajouter une série B italienne à ma liste, et ce film cauchemardesque baigne dans un tel climat d'étrangeté lyrique qu'il devient incontournable pour moi.
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- LES CAUCHEMARS NAISSENT LA NUIT, encore de Jess Franco (1970). Une superbe claque onirique assénée avec deux sous en guise de budget. On a l'impression, pendant 90 minutes, d'errer dans un autre monde.
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- LA NUIT DU CHASSEUR, de Charles Laughton (1955), dérive poétique de deux enfants qui fuient un beau-père assassin.
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- IT'S A WONDERFUL LIFE (1946) de Frank Capra. Dans un genre difficile - le conte de Noël -, Capra réalise un film d'une facture fort moderne, très émouvant à mon avis. Il véhicule en plus un étonnant message (je n'aime habituellement pas les films "à thèse", mais celui-ci est tellement bien fait, et la thèse en question, tellement humaniste et belle...)
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- VENUS IN FURS, un autre Jess Franco remarquable, encore doté de cette indéfinissable atmosphère de rêve qui imprègne une bonne part de l'oeuvre de Franco. En dépit du titre (imposé par la production), le scénario n'a rien à voir avec Sacher-Masoch. Franco pose sur la femme un regard amoureux mais intelligent.
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- CIGARETTE BURNS, un téléfilm récent réalisé par John Carpenter, est l'un de ces scénarios que j'aurais voulu écrire : un collectionneur engage le propriétaire d'un cinéma pour trouver un film extrêmement rare intitulé LA FIN ABSOLUE DU MONDE. Ce film, que très peu de gens ont vu, provoque des réactions imprévisibles et inquiétantes lorsqu'on le regarde. Ça vous fait penser au RENDEZ-VOUS DES COURTISANS GLACÉS ? Moi aussi... mais le film fut réalisé APRÈS que mon livre paraisse ! Par la bande, il me rappelle ma quête de certains films rares et énigmatiques, comme LA GOULVE, de Mario Mercier.
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- LE LOCATAIRE de Roman Polanski. Le dernier Polanski qui m'a réellement impressionné. Un film halluciné et hallucinant qui décrit une lente descente dans la folie. Deux niveaux de lecture sont possibles, ce qui rend l'oeuvre encore plus énigmatique. À ranger à côté du Polanski "noir" première période, celui du film satanisant ROSEMARY'S BABY ou de RÉPULSION.
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- ROJO SANGRE de l'Espagnol Christian Molina. Découvert à Fant-Asia. Le film met en scène Paul Naschy, une icône du cinéma fantastique ibérique ayant joué dans plus de cent films dont énormément d'oeuvres qui relèvent d'un cinéma fantastique complètement dingue. ROJO SANGRE évoque le destin de ces artisans du cinéma des années 70 qu'on juge maintenant désuets, dans l'univers
cheap de la télé-réalité et des stars instantanés. Naschy se montre teigneux et très actuel dans son propos, au service d'un scénario baroque et formidable.
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- DEEP RED et SUSPIRIA, de l'Italien Dario Argento, sont des
thrillers dont la mise en images est saisissante. SUSPIRIA se base sur une histoire que la grand-mère de l'actrice Daria Nicolodi lui racontait. C'est dire qu'on y développe un univers féminin à la fois magique et vénéneux.
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- HOUSE OF WHIPCORD, THE CONFESSIONAL et FRIGHTMARE, trois thrillers du Britannique Pete Walker, avec une actrice incroyable : Sheila Keith, qui avait environ 55 ans au moment du tournage. Ambiance glauque et folie au menu.
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- RABID DOGS de Mario Bava, un thriller italien tourné en temps réel, qui relate une prise d'otages très inusitée. Fort efficace.
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- DEATH WISH, film américain des années 70. Le scénario est passe-partout (un homme s'improvise justicier dans une ville américaine en proie à la violence et au crime), mais l'ambiance d'une jungle urbaine sale et dangereuse ne s'oublie pas facilement. Dans le même genre, en plus glauque : VICE SQUAD.
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- LA GOUTTE D'EAU, de Mario Bava, court-métrage d'épouvante quasiment muet. Le genre de film qu'on regarde comme un rituel, avec, ensuite, l'envie de se livrer à une séance de spiritisme.
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- DELLAMORTE DELLAMORE, de Michele Soavi. Soavi est un réalisateur d'une inventivité incroyable. Ce conte philosophique est passé inaperçu, sans doute à cause de sa nationalité italienne. C'est pourtant un autre joyau qui alterne les moments de poésie pure avec l'outrance et le délire propres au cinéma italien.
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- LA BELLE CAPTIVE, d'Alain Robbe-Grillet. Mon "projet littéraire" croise parfois celui de Robbe-Grillet : métisser des matériaux de culture populaire avec une esthétique d'avant-garde et des éléments de "culture savante". LA BELLE CAPTIVE en est une illustration frappante.
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- L'ÉTERNITÉ POUR NOUS, du Français Jose Benazeraf. Comment réaliser un film qu'on sent sur le bord de l'explosion. Climat de tension et le regard formidable et perçant d'un acteur hélas à la retraite : Michel Lemoine, que j'ai eu la chance de rencontrer à quelques reprises.
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- LAST HOUSE ON DEAD END STREET, de Roger Watkins. Ce brulôt est au cinéma ce que l'anarchie est à la société : un concentré de nihilisme hargneux. Ce film maudit ne connut que des embrouilles. D'abord intitulé THE CUCKOO CLOCKS OF HELL, il durait 180 minutes. À cause d'un procès, Watkins ne put pas le sortir... Il fut racheté à son insu, rebaptisé LAST HOUSE ON DEAD END STREET (pour capitaliser sur le succès du film de Wes Craven THE LAST HOUSE ON THE LEFT)... et réduit à 75 minutes ! Watkins, pour payer son loyer et dans l'espoir de pouvoir financer un autre film, fut réduit à tourner des films pornographiques tout aussi nihilistes : HER NAME WAS LISA (la descente aux enfers d'une mannequin), CORRUPTION (fable sur l'idée de "vendre son âme") ou MIDNIGHT HEAT (Les dernières heures d'un tueur à gages dont on a mis la tête à prix). Les "cochons de payants" qui s'entassaient dans les salles crasseuses de la 42e avenue à New-York ont dû réprimer leurs pulsions à la vue de ces films "X" glauques et déprimants ! Watkins est mort récemment sans avoir pu réussir son comeback.
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La liste pourrait continuer assez longuement, j'imagine, avec des titres comme FASTER PUSSYCAT KILL ! KILL ! et sa horde de criminelles qui sèment la confusion dans un ranch américain, LE SEUIL DU VIDE, adaptation d'un roman de la collection "Angoisse" du Fleuve Noir... Mais il faut se garder des histoires à raconter, des tempêtes à arpenter et des rêves à vivre éveillé. D'autres s'y succéderont, ici...